Chercheur.e.s, enseignant.e.s-chercheur.e.s
Équipe Travail, Institutions, Professions et Organisations
Mes recherches s’inscrivent dans le champ du travail, des organisations, des professions, de la santé et des émotions. Elles s’intéressent particulièrement aux questions de santé au travail, du vécu émotionnel et des régulations sociales des émotions au travail. Sociologue de formation, je puise cependant dans de nombreuses disciplines (anthropologie, droit, ergonomie, histoire, neurosciences, philosophie, psychologie, sciences de gestion, science politique) pour enrichir ces problématiques de recherche. Je recours à la méthode comparative (inter et intra-professionnelle) et m’appuie principalement sur les méthodes qualitatives pour le recueil de données, tout en cherchant à renforcer les techniques traditionnelles d’enquête par l’usage par exemple de la vidéo, des photos et des entretiens collectifs. J’utilise également les statistiques pour apporter une dimension chiffrée aux faits étudiés.
La notion de risque émotionnel au travail, développée dès ma recherche doctorale (2016), et celle plus large de vécu émotionnel s’inscrivent dans le champ de la santé et de la qualité de vie au travail. Le risque émotionnel contribue à la compréhension de la thématique générale des risques psychosociaux (RPS). Pourtant, je prends de la distance avec le paradigme qui sous-tend l’approche des RPS en cherchant à comprendre le risque émotionnel à travers trois dimensions principales. Tout d’abord, il apparaît comme un risque inhérent à l’activité de travail. Travailler, c’est s’engager émotionnellement ; de surcroît lorsque ce travail se fait avec un public éprouvé. Mais l’organisation du travail joue aussi sur l’existence et l’ampleur du risque émotionnel. J’interroge par exemple la façon dont les instances représentatives du personnel contribuent à rendre visible ou à masquer ce risque et comment les acteurs politiques du monde de l’entreprise se positionnent à son égard. Enfin, le risque émotionnel a un versant individuel dans la mesure où la biographie du professionnel influence à la fois l’exposition à ce risque et une partie des ressources qu’il peut mobiliser.
La sociologie clinique me permet de concilier à la fois la dimension objective du travail (comme champ structuré par des rapports sociaux) et sa dimension subjective (en tant que vécu affectif et personnel du sujet à son activité). En outre, cette perspective permet d’appréhender les inégalités sociales de santé dans le travail. Au-delà du risque émotionnel (et des RPS), j’interroge également l’exposition des travailleurs à une multiplicité de risques (TMS, chute de plain-pied, risque routier, etc.) et je regarde comment leur rapport au travail explique une exposition différenciée. D’autre part, le champ de la santé est aussi investi pour comprendre l’expérience de la maladie vécue par les travailleurs rencontrés, mais aussi les usagers (patients et entourages) du terrain hospitalier et notamment dans le cadre de soins palliatifs et de la fin de vie.
Le travail est un champ central pour instruire la question de l’activité collective. En étudiant les régulations sociales du risque émotionnel, mais également les pratiques de prévention en santé et sécurité au travail, je me place dans une perspective d’étude du travail collectif tel qu’il s’opère réellement. Je m’intéresse, par exemple, aux liens que les collectifs de travail entretiennent avec d’autres acteurs (hiérarchies, autres groupes professionnels, usagers, etc.) et comment ces relations et rapports sociaux participent à définir ce qu’est le travail et ses multiples modalités de réalisation. Dès lors, je me penche, entre autres, sur la question de la construction collective du sens du travail et la façon dont ce dernier oriente les pratiques professionnelles. Ce faisant, j’interroge particulièrement les processus desocialisation à l’œuvre en posant la focale à différentes échelles, comme les effets de la socialisation professionnelle à travers la formation professionnelle et l’appartenance à un collectif de travail par exemple.
D’une manière générale, j’étudie le travail à l’intersection d’une pluralité de sociologies comme dans les comparaisons faites entre des environnements organisationnels différents. L’impact de la nouvelle gestion publique (hôpital et police) sur le rapport des professionnels à leurs tâches ou à leurs publics a pu être apprécié, en mobilisant certes une sociologie du travail, mais aussi une sociologie de l’action publique ou encore des organisations. Cette approche a de surcroît était enrichie par des comparaisons avec des terrains dans le secteur privé (pompes funèbres, aide à domicile). La sociologie des organisations est aussi mobilisée pour comprendre comment la rencontre de différentes régulations structure les organisations ; en somme, par quels moyens s’organise l’action et quelles sont ses différentes formes. Il s’agit typiquement là de l’objet de la recherche menée à l’INRS (2019-2020), qui visait à comprendre de quelles sortes peut se développer une culture de prévention en santé et sécurité au travail au sein d’un réseau d’agences d’aide à domicile. Mais plus qu’une simple étude scientifique, cette recherche a consisté en une réelle recherche-action visant à accompagner l’entreprise dans le déploiement d’un projet organisationnel de prévention des risques professionnels. Cette sociologie de l’intervention implique de comprendre les différentes rationalités en œuvre dans le travail (direction, encadrement intermédiaire, opérateurs) et comment elles s’articulent pour essayer de susciter chez les sujets observés des pratiques réflexives via par exemple les entretiens collectifs ou l’auto-confrontation.
Au-delà de cela, mes recherches contribuent à une sociologie des groupes professionnels. En étudiant des milieux professionnels, elles visent à rendre compte des mutations qui s’y passent et des différentes luttes que les acteurs livrent pour être légitimés ou conquérir de nouvelles prérogatives. Si je procède pour beaucoup à une comparaison interprofessionnelle pour examiner ces problématiques, je cherche aussi à développer une comparaison intra-professionnelle afin de mieux saisir la complexité des groupes professionnels.
Je m’intéresse beaucoup aux émotions au travail comme objet de recherche. D’une part, il s’agit de participer à la démarche épistémologique réalisée par certaines disciplines, comme la sociologie ou la science politique par exemple. Comment les émotions en tant que produit social s’expriment singulièrement chez chaque individu ? D’autre part, mes recherches interrogent la place des émotions dans le travail, et notamment leur statut en tant que compétences. Je cherche alors à comprendre comment les émotions constituent un enjeu dans la définition même du travail, et cela en fonction de différents points de vue : le travailleur lui-même, mais aussi sa hiérarchie, ses collectifs d’appartenance, et les usagers.
Cet intérêt pour les émotions et plus largement les affects au travail n’est pas uniquement théorique. La question méthodologie de l’usage des émotions comme catégorie d’analyse sociologique est aussi questionnée. J’essaie de contribuer aux réflexions portant sur l’ethnographie des affects, à savoir les méthodes possibles d’examen de cet objet de recherche, mais aussi les enjeux qu’il sous-tend.
Ouvrage
– Bonnet, T., (2020), La régulation sociale du risque émotionnel au travail, Toulouse, Octarès
Numéro de revue (coord.)
– Rochedy, A., Bonnet, T., (dir.) (2020) « Enquêter sur les affects : quels enjeux, quelles méthodes ? », Recherches qualitatives, Vol. 39, n°2, https://www.erudit.org/fr/revues/rechqual/2020-v39-n2-rechqual05669/
Articles (revues à comité de lecture)
– Bonnet, T., Primerano, J., (2022), « Les masques de la reconnaissance », Lien social et Politiques, n°88, p. 89-110.
– Bonnet, T., Drais, E., Lapoire-Chasset, M., Primerano, J., Rossignol, K., (2021), « Reconfiguration of the boudaries of occupational risk prevention observed during the COVID-19 pandemic : the cas of peersonnal protective equipment and collective protection in France”, Health, Risk & Society, DOI : 10.1080/13698575.2021.2003305,
– Rossignol, K., Primerano, J., Lapoire-Chasset, M., Drais, E., Bonnet, T., (2021), « Prévenir les risques au travail face à la Covid-19. Les masques comme moyens de protection individuelle et collective », Chroniques du travail, n°11
– Bonnet, T., Drais, E., (2021), « Comprendre les inégalités sociales de santé par la dimension émotionnelle du travail. Esquisse d’une typologie dans le secteur marchand de l’aide à domicile », Revue française des affaires sociales, n°4, p. 227-244.
– Bonnet, T., Drais, E., (2021), « Les tensions du travail d’articulation dans l’encadrement de l’aide à domicile. Le cas du secteur marchand face à une pénurie de ressources » Sociologies pratiques, n°42, vol. 2, p. 33-43.
– Bonnet, T., Rochedy, (2020), « De la (re)découverte des affects à l’affectivité limitée », Recherches qualitatives, Vol. 39, n°2, p. 1-14. https://www.erudit.org/fr/revues/rechqual/2020-v39-n2-rechqual05669/1073506ar/
– Drais, E., Bonnet, T., (2020), « Former à la sécurité au travail : l’enjeu d’une culture organisationnelle de prévention. Illustration dans l’aide à domicile », Education permanente, n° 224, vol. , p. 105-114
– Bonnet, T., (2018), « Des émotions professionnelles dans la relation socio-éducative à l’hôpital et dans la police. Une construction collective et individuelle de l’intelligence émotionnelle », Sociétés et jeunesses en difficulté [en ligne], 20, mis en ligne le 30 septembre 2018, consulté le 12 octobre 2018 : URL : http://journals.openedition.org/sejed/8552
– Bonnet, T., (2018), « Ethnographie comparée du risque émotionnel au travail. Une tâche aveugle de l’agenda politique », Revue Internationale de Politique Comparée, Vol. 25, n° 3-4, p. 123- 149.
– Bonnet, T., (2018), « Officier ou ouvrier ? Les nouveaux officiers de police judiciaire français », Déviance et Société, vol. 42, n°1, p 113-139.
– Bonnet, T., (2016), « Apprentissages émotionnels. Le poids des collectifs de travail », La Nouvelle revue du travail, [En ligne], 9, mis en ligne le 02 novembre 2016, consulté le 07 novembre 2016. URL : http://nrt.revues.org/2911
– Bonnet, T., (2015), « La normalisation du rôle parental par une équipe soignante », Recherches familiales, n°12, p 223-234.
– Bonnet, T., Filion, N., (2014), « Formes et usages de la mémoire dans la construction de l’éthos professionnel », Sociologies pratiques, n°29, vol 2, p 83-91.
Chapitre d’ouvrage
– Bonnet, T., (à paraître 2023), « Jusqu’où aller ? Engagement et ethnographie de l’hôpital, des pompes funèbres et de la police », in Cohen, P., Monjaret, A., Rémy, E., Sirost, O., (dir), Ethnographies et engagements, Rouen, PURH.
– Drais, E., Bonnet, T., (2022), « La contractualisation émotionnelle et ses ambivalences au cœur de l’aide à domicile », in Burnay, N., (dir), Sociologie des émotions, Louvain-la-Neuve, De Boeck.
– Bonnet, T., Rochedy, A., (2021), « Regard croisé sur l’épreuve affective du terrain. Analyse des affects et chercheur.e.s affecté.e.s », in Héas, S., Zana, O., (dir), Les émotions dans la recherche en sciences humaines et sociales, Rennes, PUR, p. 157-173.
– Bonnet, T., (2016), « La réquisition de police : L’acmé du sale boulot dans les pompes funèbres », in Memmi, D., Raveneau, G., Taieb, E., (dir), Le social à l’épreuve du dégoût. Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 45-55.
Rapport de recherche
– Drais, E., Bonnet, T., (2020), Note de synthèse sur la culture organisationnelle de prévention, Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des risques professionnels, 12 p.
– Bonnet, T., (2015), « Le collectif de travail face au risque émotionnel », Rapport de recherche, Certop ; Université de Toulouse Jean Jaurès, 107 p.
Colloque avec actes
– Bonnet, T., (2017), « Un engagement à risque émotionnel ? Ethnographie de l’hôpital, des pompes funèbres et de la police », Ethnographies plurielles # 7, Ethnographies et engagements, colloque des 9 et 10 novembre 2017, Mont-Saint-Aignan. https://hal.archives-ouvertes.fr/NIMEC/hal-01885013
Compte-rendu de lecture
– Bonnet, T. (2019), compte-rendu dans la Revue française de sociologie, n° 60. Vol.2, (Aurélie Jeantet, 2018, Les émotions au travail, Paris, Editions du CNRS, 326 p.)
Conférencier invité
– Bonnet T., (2021), « Le risque émotionnel dans les soins : enjeux théoriques et méthodes en pédiatrie et dans l’aide à domicile », invité à communiquer au séminaire sur la thématique de "l’étude des émotions dans le secteur de l’aide et du soin selon différentes approches", du réseau Association pour la Recherche en Psychologie Ergonomique et Ergonomie (Arpège), Paris
– Bonnet, T., (2020), « La régulation sociale du risque émotionnel au travail », Invité à présenter l’ouvrage aux 6½ du Réseau Recherche Scientifique pour l’Amélioration des Conditions de Travail (Resact-MP), Toulouse
– Bonnet, T., (2018), « La régulation sociale du risque émotionnel au travail : du concept à la méthode de recueil de données », invité au séminaire doctoral concept et méthodes pour conduire des recherches associant organisation, travail réel et santé, Toulouse
– Bonnet, T., (2017), « Officier ou ouvrier ? Les nouveaux officiers de police judiciaire français », invité à présenter l’article primé au concours jeunes chercheurs organisé par la revue Déviance et Société à un colloque international, Paris.
– Bonnet, T., (2017), « Le risque émotionnel, une condamnation théorique des émotions au travail ? », invité au colloque Réinterroger la pertinence de la notion de risque pour aborder la santé au travail et le travail, Paris.
Colloques
– Drais E., Bonnet, T., (2021), « Le travail émotionnel comme moyen de saisir l’expérience des atteintes à la santé et l’engagement en prévention. Un exemple dans l’aide à domicile », RT 19 (Santé, médecine, maladie et handicap), 9e congrès de l’AFS, Lille (à distance).
– Bonnet, T., (2021), « Comment la dimension émotionnelle du travail permet de comprendre les inégalités sociales de santé ? Le cas du secteur marchand de l’aide à domicile. 1er Symposium international FAB.ISS, Toulouse (à distance).
– Bonnet, T., Rochedy, A., (2018), « Introduction à la conférence plénière de Jean Peneff », Biennale d’ethnographie de l’EHESS, Paris
– Bonnet T., Rochedy, A., (2018), « Introduction et animation de l’atelier « Être affecté.e / Observer et décrire des affects », Biennale d’ethnographie de l’EHESS, Paris
– Bonnet, T., (2017), « Les collectifs de travail, un pouvoir de décision collectif ? », RT25 (Travail, Organisations, Emploi), 7e congrès de l’AFS, Amiens.
– Bonnet, T., (2016), « Le collectif de travail face au risque émotionnel : une régulation sociale routinière ? », XXe congrès de l’AISLF, Montréal.
– Bonnet, T., (2013), « La soignante, l’enfant… et le parent », CR 08 de l’AISLF, « autour de l’enfant », Lausanne.
– Bonnet, T., (2013), « L’acmé du « sale boulot » dans les pompes funèbres : les réquisitions de police », 5e congrès de l’AFS, Nantes.
– Bonnet, T., (2012), « Le travail émotionnel comme facteur de risque dans les professions à risques émotionnels, quelle régulation possible », XIXe congrès de l’AISLF, Rabat
Séminaires
– Bonnet, T., (2021), « Réflexion autour de l’engagement émotionnel des aides à domicile pour comprendre leur exposition aux risques professionnels », Séminaire transversal du Centre Max Weber, Lyon.
– Bonnet, T., (2020), « Les émotions dans le travail par l’approche du risque émotionnel », Séminaire de l’équipe dispositions, pouvoir, cultures et socialisations du Centre Max Weber à l’ENS Lyon.
– Bonnet, T., (2015) « Le travail relationnel et le travail d’organisation : un apprentissage collectif du travail », Séminaire « Penser et produire le travail relationnel », Les journées « Travail » du CERTOP-CNRS.
– Bonnet, T., (2015) « Le risque émotionnel : quand l’émotion perturbe le travail », Speed-searching pour les 20 ans du CERTOP, Université Toulouse Jean Jaurès.
– Bonnet, T., (2013), « La socialisation technique, relationnelle et émotionnelle dans les pompes funèbres et à l’hôpital », Séminaire du pôle SPOT, CERTOP, Université Toulouse 2, Le Mirail.
– Bonnet, T., (2012), « Le travail émotionnel comme facteur de risque dans les professions à risques émotionnels, quelle régulation possible ? », séminaire du pôle SPOT, CERTOP, Université Toulouse 2, Le Mirail.
Dans les médias
– 2020- interviewé par Benoît Zittel pour Anthropie. https://feeds.podcastics.com/podcastics/podcasts/rss/855_e194b5b5b5053261731198889531fa90.rss
– 2020 – interviewé par Joëlle Maraschin pour Actuel HSE sur la sortie de l’ouvrage La régulation sociale du risque émotionnel au travail. https://actuel-hse.fr/content/interview-thomas-bonnet-le-risque-emotionnel-est-invisible-pour-lorganisation-du-travail
– 2019 – Interviewé par Chris Bockman pour la BBC « News report on police suicides in France » diffusé le 4-12-2019.